Notice: Trying to access array offset on value of type bool in /home/vava2003/public_html/wp-content/plugins/jet-reviews/includes/class-jet-reviews-integration.php on line 105

Notice: Undefined index: options in /home/vava2003/public_html/wp-content/plugins/elementor-pro/modules/theme-builder/widgets/site-logo.php on line 192
Le rhum à l'épreuve du covid-19 : entretien avec Audrey Bruisson, directrice marketing de Spiribam - Sugarcanelane

– Martinique –

Rencontre

Audrey Bruisson,
Directrice Marketing de Spiribam

"J’ai appris combien on pouvait compter les uns sur les autres."

Rencontre & Société

Spiribam, c'est les rhums Clément, les rhums JM et beaucoup plus encore.

Alors, comment on gère les répercussions d'une crise sanitaire mondiale quand on assure la notoriété de deux des plus belles marques de la Martinique ?

Entretien (téléphonique) avec Audrey Bruisson.

canne à sucre

Itinéraires d'une enfant du pays

Dans cet article

Enfant, Audrey s’était promis que quoiqu’il advienne, sa vie serait faite de voyages. Et il faut croire qu’elle a tenu parole. Des camps de vacances pour ados, aux études en école de commerce, jusqu’à ses choix de carrière, elle a sillonné la Caraïbe, visité la Tunisie, posé ses valises en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, puis au Mexique et d’autres pays encore.

Aujourd’hui, ça fait 8 ans qu’elle se trouve à la tête du marketing et de la communication de près d’une dizaine de marques de rhums chez Spiribam (une branche de GBH, Groupe Bernard Hayot). Elle se souvient des débuts :

Audrey Bruisson devant la gamme des rhums Spiribam

"C’était comme les morceaux d’une histoire qui se mettaient enfin en place. Mon goût des voyages, mon expérience du marketing produit et mon attachement à la Martinique ; tout ça prenait pleinement un sens.

Vous savez, c’est un drôle de mélange de surprise et de fierté quand vous vous trouvez à l’autre bout du monde, et que vous voyez pour la première fois sur un rayonnage de magasin ou dans un bar à cocktails… une bouteille de rhum agricole ! Et puis que tout d’un coup, vous devenez le centre de l’attention, lorsque vous révélez que vous venez de ce tout petit bout d’île qui a produit cet excellent rhum qui ne laisse pas indifférent.

Faire connaître notre rhum et ceux qui le font, en être littéralement l’ambassadeur pour notre île : oui, je crois que j’ai le métier rêvé."

Spiribam, des rhums à la conquête du monde

Spiribam regroupe plusieurs marques de rhums des Antilles et de l’Océan Indien

Martinique : Clément et J.M

Sainte-Lucie : Chairman’s Reserve, Admiral Rodney et Bounty

Ile Maurice : Arcane et Beach House

Depuis quelques années déjà, Spiribam mise sur le rhum vieux et le haut de gamme pour se faire une place sur le marché mondial des spiritueux, avec en ligne de mire, l’Europe et les Etats-Unis.

Sa stratégie s’appuie fortement sur l’Appellation d’Origine Contrôlée “Rhum Agricole” pour les rhums Clément et JM fabriqué en Martinique, et mise sur le rhum vieux et le marché des cocktails.

Photo : Ronan Le May | Instagram @thatsronan

La 3ème édition de la Clément Ti’Punch Cup n’aura pas lieu en 2020

Habitation Clément, Martinique
Habitation Clément

Pour Audrey et pour les amateurs de rhum, le mois de mars était très attendu : le site de l’Habitation Clément s’apprêtait à accueillir la grande la finale de la Clément Ti’Punch Cup 2020.

Martinique, Nouvelles-Orléans, Paris, Athènes et enfin Shanghai : l’année 2019 avait été un marathon de concours pour sélectionner les barmen et les barmaids qui s’affronteraient pendant la grande finale.

Oui mais voilà, la pandémie de covid-19 met le holà aux préparatifs de la grand-messe du ti’punch et le confinement stoppe net toute velléité de rassemblement. Rideau. On range les verres.

Et alors, on fait quoi ?

Habitation Clément, Martinique
Habitation Clément

Audrey se repasse le film des derniers mois…

… pour retrouver l’instant T ou plutôt la période où le Covid-19 est apparu d’abord comme un phénomène lointain puis a grossi, grossi, pour devenir un risque voire même un danger. 

"En décembre, je suis allée à Shanghai pour les qualifications de la finale de la Clément Ti’Punch Cup. J’étais en mode découverte. C’était la première fois que je me rendais là-bas et que je rencontrais en personne notre distributeur, et bien sûr les barmen asiatiques en compétition.

L’ironie c’est que je n’ai jamais été aussi près de l’épicentre historique de la maladie, alors que c’est un phénomène que je regardais de loin, même si c’était de manière attentive. Genre, "ça a l’air sérieux, mais ça n’est pas pour nous."

Rien de grave. Jusqu’à ce que…

Fin janvier, Spiribam prend la décision d’annuler la venue des barmen asiatiques en Martinique pour la finale de la Ti’Punch Cup. Plus tard, c’est la compétition qui est reportée. Drastique mais nécessaire.

Photo Helena Lopes

"C'était la meilleure chose à faire."

Allée bordée de cocotiers menant à l'Habitation Clément
Entrée de l'Habitation Clément

"A mon retour à Paris, jour après jour, je prenais la mesure de ce que pouvait représenter le covid-19. Il s’incrustait dans nos conversations, entrait dans notre quotidien avec ces gestes-barrière continuellement recommandés, se laver les mains plus souvent, garder ses distances dans les transports, et régulièrement, ces images du confinement en Chine aux infos…

Sauf que là, pour moi, ce n’était pas juste les infos qu’on regarde comme ça, distraitement, avant de passer à autre chose. La Chine, j’y étais allée. J’y avais rencontré des gens, on avait parlé, on avait ri ensemble. Je n’en étais même encore pas à considérer le coronavirus comme un risque qui pouvait m’atteindre, mais j’avais conscience que ça touchait concrètement des personnes. Je me sentais complètement en empathie.

Et puis, c’est devenu inéluctable : l’Italie était touchée et pour la France, ça n’allait pas tarder. La Clément Ti’Punch Cup c’était tout près, en mars. Il y avait des choix à faire, vite. La Martinique est une petite île : en très peu de temps, tout le monde finit par rencontrer tout le monde. Imaginez le potentiel de propagation d’une maladie hypercontagieuse ! Alors, avec la direction, nous avons pris la décision de reporter la Clément Ti’Punch Cup. Plus d’un an d’efforts, sans parler des budgets investis, des centaines de gens impliqués et de l’ensemble des retombées que l’on ne verra pas, en tout cas pas en 2020.

Mais au bout du compte, face à un risque sanitaire majeur, nous savions tous que ce n’était pas ça le plus important. On finit par relativiser. C’était la meilleure chose à faire."

Allée bordée de cocotiers menant à l'Habitation Clément
Entrée de l'Habitation Clément

S’adapter, s’adapter, s’adapter

Déterminée mais pas stressée, et certainement pas abattue

Le déclenchement du confinement la fixe temporairement à la Martinique. Le marché tourne au ralenti, l’humeur n’est pas à la consommation festive, et les bars à cocktails ont baissé le rideau en espérant des jours meilleurs.

"Mon métier m’a appris quelque chose d’essentiel, en particulier avec l’événementiel. Ce que je peux contrôler, je fais en sorte de le contrôler avec tous les outils possibles. Mais ce qui est au-delà de ma volonté, en dehors de mon pouvoir, je dois l’accepter pour mieux m’adapter. Ce qui nous arrive, c’est quelque chose de mondial qui nous dépasse tous.

Nos projets, nos rencontres, notre calendrier d’événements, notre quotidien, tout ça, ça a volé en éclats : annulé, reporté, chamboulé. S’adapter, s’adapter, s’adapter, il n’y avait plus que ça à faire. Avec l’équipe, on s’est retroussé les manches. Confinement oblige, nous avons déserté les bureaux de Paris, tout le monde s’est retrouvé au régime télétravail, l’équipe littéralement explosée aux 4 coins de la France, et moi à la Martinique."

Que faire au cœur de la tempête ? Attendre à fond de cale en faisant le dos rond ? Certainement pas. Garder le cap. Oui, assurément. Pour Audrey et son équipe, la tempête, c’est dans les cerveaux qu’elle se passe : les ventes sont en berne, on ne peut plus rencontrer les distributeurs, on ne peut plus organiser d’événements. Bref, ils ne peuvent plus faire ce qui faisait une bonne partie de leur métier.

Qu’à cela ne tienne ; c’est là qu’il faut chercher des alternatives, nouveaux canaux de communication, être créatif, avoir le sens de l’à-propos, rebondir… Innover quoi.

Audrey Bruisson facing shelvings of rum bottles

"Bien sûr, tout le monde est préoccupé par les incertitudes ou même la colère qu’amène le confinement, mais c’est dans des situations comme celle-ci qu’il faut apporter du lien : du lien avec nos clients, du lien avec nos distributeurs. Ne pas perdre le contact. On est soucieux, mais la vie ne s’arrête pas pour autant.

Le plus délicat au départ, ça a été de trouver le ton juste : avoir de l’empathie et montrer qu’on est présent sans s’imposer.

On a continué à diffuser de l’info autour de ce qui nous tenait à cœurs, nos produits, nos métiers, notre savoir-faire, en s’appuyant énormément sur les réseaux sociaux. L’avantage de travailler pour des marques internationales, c’est que notre réseau de distributeurs nous permet d’avoir des remontées des différents pays. Ça aide à avoir une approche plus fine pour rester en phase avec notre audience. Là, je dois dire que la Chine en particulier nous a beaucoup aidés à calibrer notre approche : ils ont été les premiers à avoir été touchés et donc les premiers à avoir testé de nouvelles idées. Ils nous ont un peu servi de poisson pilote."

Avec le confinement, les marques de rhum ont considérablement amplifié leur présence sur Facebook et Instagram. Elles se sont appropriées les stories, les lives et les chats pour apporter un supplément d’interaction à défaut d’une présence en chair et en os. Vous pourrez même échanger avec Audrey pendant une de ses vidéos apéro sur Instagram.

Et demain ?

Lorsque je demande à Audrey le premier enseignement qu’elle tire du confinement, pas de grandes déclarations sur les métamorphoses possibles de son métier avec le numérique, ni sur les aléas des objectifs marketing, ni même la volonté de garder vivace l’esprit Clément Ti’Punch Cup. Sa réponse a été humaine, profondément humaine.

Femme de dos face à la colonne à distiller de la distillerie JM
Colonne de la distillerie JM

"J’espère que cette période ne pèsera pas trop longtemps sur les esprits au point de créer des peurs et des traumatismes. Même si dans le fond, je crois sincèrement que quand on prive les gens de contacts humains, ils finissent par les recréer à leur manière.

Avec le confinement, je me suis rendue compte combien l’humain et la convivialité sont importants dans l’environnement dans lequel j’évolue. Le rhum est un produit-passion. C’est une industrie très sociale et sociable. On aura besoin de retrouver cette convivialité. Et peut-être même qu’il faudra la réinventer.

Sans vouloir faire de l’angélisme, je dois dire que j’ai de la chance. J’aime mon métier, j’ai une grande admiration pour ceux qui se dédient à l’industrie du rhum et surtout, je peux m’appuyer sur une équipe solide. On ne s’est pas effondré, on a fait face ensemble. Et aujourd’hui, on a hâte de se retrouver. Le confinement nous a donné un autre regard sur le monde, sur notre métier et sur notre capacité à faire front. Il nous a démontré que l’inventivité est un bon remède à l’adversité. Des épreuves, il y en aura d’autres, mais de celle-là au moins, je sais qu’on est ressorti renforcés."

Femme de dos face à la colonne à distiller de la distillerie JM
Colonne de la distillerie JM

Un jour, on fera l’inventaire de ce que les 3 C [Coronavirus | Covid-19 | Confinement] nous auront légué, émotionnellement, socialement, politiquement, économiquement, culturellement… Mais il est trop tôt pour le dire parce que l’histoire est illisible quand elle s’écrit sous nos yeux.

Ce qui nous aidera à sortir indemnes ou même meilleurs de cet étrange épisode de nos vies qu’est le confinement, c’est la force de notre lien avec les uns et les autres, dans un monde où la proximité nous est interdite — pour combien de temps encore ?

Le rhum à la rescousse

Dès la fin mars, par un communiqué très sobre, le Groupe Bernard Hayot annonçait “s’associer à l’effort de guerre” contre le coronavirus. La distillerie JM a adapté son outil de production pour sortir l’alcool nécessaire à la fabrication de 10 000 litres de gel hydro alcoolique à destination du “personnel de santé, de l’armée, de la gendarmerie et des pompiers”. C’est l’Habitation Clément qui en a assuré le conditionnement et le transport.

Le CODERUM (comité d’organisation et de défense du rhum martiniquais) a en parallèle sollicité les autres distilleries de la Martinique pour une même initiative. La production a été regroupée à la distillerie Saint-James.

Un très grand merci à Audrey pour sa participation !

Notre article vous plaît ? Partagez-le !

14 comments

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous aimerez aussi...

Close