Sur les quelques 80 élèves dont elle a la charge, Dominique n’a de contacts réguliers qu’avec une petite vingtaine. C’est bien en-dessous des 5 à 8 % des élèves en France métropolitaine dont on est sans nouvelle depuis la mise en œuvre du confinement. Dominique ne peut que supposer que dans le meilleur des cas, un certain nombre d’entre eux ont préféré délaisser les maths pour privilégier les matières les plus importantes pour leur filière.
On imagine les 13-16 ans hyperconnectés et à l’aise avec les outils numériques, mais il n’en est rien ! S’ils ont un usage quasi intuitif des réseaux sociaux, ce sont de vrais brêles quand il s’agit de se connecter à une plateforme d’échange de documents, rédiger un email, ajouter ou télécharger une pièce jointe, utiliser un traitement de texte, ou encore mettre un document au format PDF… S’ils disposaient tous d’un ordi ce serait déjà bien, mais quand l’accès au numérique se limite au smartphone, ça devient compliqué de renvoyer sa copie.
Dominique estime qu’avec le confinement, un outil comme Pronote devient indispensable, mais tous les élèves n’en voyaient pas l’utilité : à quoi bon quand on n’a pas d’ordinateur à la maison et quand on peut se mettre à jour au lycée ou au contact des copains ? En dehors des activités récréatives, peu d’élèves sont véritablement rodés aux pratiques numériques, comme se créer une adresse email “sérieuse” avec un libellé conventionnel. En tant que professeur de math, hésiter à ouvrir un email de Choupette972 qui pose une question sur les équations à 2 inconnues peut prêter à sourire…
Plus sérieusement, avec la crise sanitaire et le confinement ce sont les inégalités qui se creusent : entre celles et ceux qui ont accès à du matériel informatique, un environnement de travail propice et des parents capables de les épauler, et les autres, dans l’impossibilité de s’isoler au calme, ont besoin d’être guidés et n’ont pour seul accès Internet qu’un smartphone.
C’est l’aveu d’impuissance auquel Dominique a dû faire face lorsqu’une de ses élèves a fini par baisser les bras :
6 comments
Un bel article, moins fun, mais c’est le sujet qui veut ça mais encore une fois très bien écrit et instructif.
Merci
En effet, c’est la période qui veut ça et l’école reste un sujet sensible. Le bon côté de l’histoire, c’est que ça met en évidence pour un peu plus de monde, la nécessité de repenser et moderniser l’éducation.
à bientôt !
Article très intéressant, enseigner dans le contexte actuel vu par un insider : top. Je ne pensais pas que les ados actuels étaient si peu à l’aise avec la technologie dès qu’on en exclut les réseaux sociaux. A bientôt pour la prochaine Rencontre 🙂
Merci beaucoup Pop !
Moi aussi, j’ignorais que les ados n’étaient pas des virtuoses du numérique sur tous les plans. Mais quand on y pense, c’est assez logique : le numérique ne fait pas encore si intégré aux outils de travail à l’école et puis bon nombre d’ados ne disposent pas d’un ordinateur. Ce sont des choses qu’ils commencent à appréhender un peu plus tard avec Parcours Sup, quand ils font leurs dossiers de candidature.
à bientôt !
Bel article, qui correspond à mon vécu et d’enseignante pendant cette étrange période
Chère Annick,
Merci beaucoup ! Je suis à la fois ravie et touchée que tu te retrouves dans cet article. Etrange période en effet qui bouscule tous nos repères. Pour combien de temps encore, ça reste à voir.